usage

Les miracles de Notre-Dame du Répit

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Dans le petit village d’Avioth (Meuse) s’élève une somptueuse basilique dont la construction au XIIIe siècle s’explique par la découverte, deux siècles plus tôt, d’une statue miraculeuse de la Vierge.

Avioth-procession.

Les pèlerins qui venaient implorer cette dernière déposaient leurs offrandes dans la Recevresse, une élégante chapelle de forme hexagonale. A une époque où le nombre d’enfants mort-nés et la mortalité infantile étaient très élevés, les nourrissons décédés avant d’avoir été baptisés ne pouvaient être enterrés, chrétiennement, ni aller au paradis. De nombreux parents transportaient donc le corps de leur enfant jusqu’à la statue miraculeuse d’un sanctuaire à répit. Ils attendaient le signe de vie (changement de couleur, mouvement du corps, saignement, sueur chaude) qui permettrait de le baptiser.

On estime à 135 le nombre de miracles qui y furent recensés, entre 1625 et 1673. A la fin du XVIIe siècle, l’évêque de Toul interdit la pratique des répits. Le pape la condamna en 1729. A Avioth, elle perdurera clandestinement jusqu’au milieu du XIXe siècle.

« A la découverte de la France mystérieuse. »  Sélection du Reader’s Digest. Mai 2001.

Les femmes habillées en homme

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dispute-culottes

La Ligue pour l’émancipation des femmes voudrait, dit-on, modifier le costume féminin. A ce propos, les journaux ont publié la curieuse information suivante :

D’une manière générale, la Préfecture de police n’accorde de permission de travestissement que si le ou la pétitionnaire produit un certificat médical attestant la nécessité de ce travestissement. Des exceptions furent faites à cette règle, exigeant le certificat médical, pour Mmes Dieulafoy, Rosa Bonheur, une ex-artiste de la Comédie Française qui voulait assister à une partie de chasse, et, il y a longtemps, pour Marguerite Bellanger.

Il y a actuellement dix femmes à Paris ou en province qui sont autorisées à porter le costume masculin. Il faut compter une directrice d’imprimerie qui peut passer absolument pour un homme, une femme qui exerce la profession de peintre en bâtiment, une artiste peintre, une femme à barbe qui a figuré à l’Eden autrefois, deux personnes mal conformées, et, enfin, une femme qui, extérieurement, a tout à fait l’air d’un homme, tellement elle serait ridicule si elle portait les vêtements de son sexe.

D’autre part, un marchand de pommes de terre de la banlieue a été autorisé à porter constamment un costume de femme, à cause d’une infirmité qui lui rend impossible l’usage d’habits d’homme.

« Gazette française. » Paris, 1891. 

Le sanglier du mardi gras

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Rosa-Bonheur

Jadis, au pays du Morvan, existait un curieux usage. Le mardi gras, les chasseurs de cette contrée giboyeuse avaient l’habitude de festoyer d’un jeune sanglier, énergiquement accommodé en l’honneur du carnaval. Mais, avant de réduire la « bête noire » en jambon, en boudins, en côtelettes et de servir triomphalement la hure arrosée de vieux bourgogne, il était procédé, en pompe joyeuse, à la plus originale et à la plus pittoresque des processions.

Sur une charrette enguirlandée de verdure que traînait un âne orné de grelots et de rubans, on disposait le cadavre du sanglier dans l’aimable posture d’un personnage qui est à table. On avait d’abord lavé les soies, débarbouillé le groin et poli les défenses. Au cou du sanglier pendait une large serviette blanche. A ses pattes de devant, allongées comme des bras, étaient fixés une fourchette et un verre. Une couronne en feuillage épineux de houx (symbole de l’humeur grincheuse du « prince des forêts ») entourait son front farouche.

Dans cet accoutrement carnavalesque, on promenait la bête noire à travers le village, aux sons des fifres et des cornemuses. Des masques dansants égayaient le cortège. Et, de porte en porte, la charrette, que l’âne traînait fièrement en faisant sonner ses grelots, recevait l’offrande gastronomique des habitants : du beurre, du vin, des miches, des œufs, du lard, du jambon. Le soir, sur la place publique, à la lueur des torches, on vidait la charrette de tous les dons culinaires qui étaient distribués aux pauvres du pays.

Après ce charitable et joyeux pèlerinage, on s’occupait soigneusement du sanglier, qu’on préparait avec art pour le banquet des chasseurs, auquel, selon la traditionnelle courtoisie de nos pères, les dames assistaient : la hure à la plus belle, le jambon au plus vaillant.

Pourquoi ce curieux usage ? Peut-être avait-on choisi ce jour de bombance pour célébrer l’heureux trépas du sanglier, ce grand destructeur des récoltes et ce fléau des champs. Quant à la chair indigeste et fade du sanglier ce n’est pas, à vrai dire, un morceau de prince.

Le marquis de Cussy, plus pratique et plus expert que Brillat-Savarin, déclarait qu’elle doit « se repentir » au moins quinze jours dans la plus énergique et la plus aromatisée des marinades. A notre avis, un marcassin d’un an peut, seul, distraire une fourchette curieuse et blasée, et, encore, il serait téméraire d’accommoder son jambon à l’allemande, c’est-à-dire aux cerises noires et aux confitures d’abricot.

Vieilles coutumes, charmants usages, douces légendes, tout cela a disparu à l’horizon des passés sans retour, comme le sanglier lui-même tend, chaque jour, à disparaître. Dans un demi-siècle, peut-être, ce gibier farouche ne sera plus qu’un souvenir gastronomique, exhalant des senteurs imaginaires dans la « Cuisinière bourgeoise ».

« La Revue limousine : revue régionale. » Fulbert-Dumonteil, Limoges, 1927.
Illustration : Rosa Bonheur.

La procession aux harengs

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procession

Voici comment les chanoines de la cathédrale de Reims égayaient autrefois la tristesse du mercredi saint :

Après les ténèbres, ils sortaient de l’église, rangés sur deux files, et traversaient toute la ville en procession, chacun traînant derrière soi un hareng attaché à une corde. Chaque chanoine était occupé à marcher sur le hareng de celui qui le précédait, et à sauver le sien des surprises du chanoine qui le suivait.

De là, des bonds, des sauts, des écarts, un sautillement général de chanoines et de harengs, à la plus grande joie de toute la population rémoise.

Il fallut force décrets pour supprimer cet usage extravagant.

« Bureaux de la Mosaïque. »  Paris, 1874.