remède

Remède consomptif

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Il y a un drôle à Williamsburg qui s’intitule ministre de l’Evangile et vend une « potion consomptive ».

Je suppose qu’il veut dire que c’est un remède contre la consomption. C’est quelque ripopée dans une fiole bouchée, mais il y a beaucoup de gens assez idiots pour lui en acheter. En Novembre dernier, un certain personnage désira ardemment, dans l’intérêt de l’humanité, avoir une entrevue avec le révérend frère, mais il fut aussi inaccessible qu’un moine dans sa cellule. La personne écrivit au fripon un billet fort poli pour s’informer des prix. Il reçut en réponse une circulaire imprimée, dans laquelle l’excellent homme exposait, de la manière la plus touchante, le chagrin qu’il éprouvait d’avoir augmenté ses prix, à cause du prix de l’or avec lequel, disait-il, je suis obligé d’acheter mes médicaments à Paris. Cette réponse était à la fois triste et peu satisfaisante, et le monsieur se rendit à Williamsburg pour avoir avec lui une entrevue et se rendre compte de tous les prix. Il se présenta à la demeure du pieu personnage, mais, chose étrange, il n’était pas à la maison.

La personne attendit. Le révérend frère continua à ne pas être à la maison. Quand le monsieur eut attendu tout son content, il s’en retourna.

Il est bien entendu qu’il ne faut pas songer à voir le révérend frère. Peut-être est-il si modeste et si timide qu’il ne veut pas affronter les acclamations de reconnaissance des millions d’humains qu’il a sauvés par sa potion consomptive et qui ne lui permettraient pas de passer dans les rues. Il est dommage que le révérend ne jouisse pas de la réclusion encore  plus complète par laquelle l’état de New York témoigne son appréciation des vertus cachées et modestes dont il est orné, dans la salubre et paisible ville de Sing Sing. 

Phineas Taylor Barnum. « Les blagues de l’univers. »  Paris, 1866.
Illustration : Burt Lancaster, « Elmer Gantry, le charlatan. »  Richard Brooks, 1960.

Les sangsues

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souper

Le Dr P…, de Villefranche-sur-Saône, ordonne à un pleurétique du village d’Ars l’application de douze sangsues. La femme les va quérir à la pharmacie M…

Huit jours se passent. La cliente retourne à l’officine et le titulaire lui demande si lesdites hirudinées ont soulagé le patient.

« Il a bien fait la g… pour les avaler, ça lui a ben fourré la colique, mais ça la tout de même guéri. »

Stupéfaction du digne apothicaire, qui partit d’un fou rire apprenant que les sangsues, considérées comme goujons, avaient été accommodées au beurre et sautées à la poêle.

« Le Passe-temps médical : journal des curiosités médicales, anecdotiques, historiques, littéraires et scientifiques. »  Lyon, 1898.
Illustration : Léon Augustin Lhermitte

Apologue

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aveugle

Le poète Scheichi était pauvre et, afin de gagner de quoi vivre, distribuait une eau qu’il disait très salutaire pour les maux d’yeux.  Mais, bien qu’ayant lui-même les yeux en mauvais état, il ne se servait jamais de son remède.

Un jour, une personne voulant user de ce spécifique, lui en acheta une dose, mais lui paya deux fois le prix convenu.

Scheichi voulut refuser et rendre la somme donnée on trop. L’acheteur lui dit :

« Je vous paie en double pour qu’avec le prix excédant, vous vous fassiez cadeau à vous-même d’une dose dont vous frotterez vos yeux, qui en ont bien besoin. »

N’est-ce pas l’histoire de beaucoup de gens, s’avisant de donner aux autres des conseils dont ils ne font jamais usage ?

« Musée des familles. » Paris, 1896.

L’élixir du docteur Beaumont

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pharmacie

La sûreté recherche actuellement un escroc qui avait trouvé un moyen peu banal de voler les pharmaciens. Cet individu avait loué, 140, rue Saint-Martin, un petit logement au rez-de-chaussée, sous le nom de Céguin, commissionnaire en marchandises.

Dans la journée, quatre femmes, les complices de Céguin, se rendaient dans un grand nombre de pharmacies et demandaient des flacons d’élixir spécifique du docteur Beaumont.

Ce médicament étant inconnu des pharmaciens, la cliente pria qu’on voulût bien s’en procurer chez M. Céguin, rue Saint-Martin, 140, pour les lui livrer à l’hôtel du Louvre.

Les pharmaciens, pleins de confiance, envoyèrent acheter les flacons au prix de 8 francs chacun ; mais quand ils les firent porter à l’adresse indiquée, la cliente était inconnue.

Le soir même, Céguin a déménagé… après avoir vendu un millier de flacons du fameux élixir qui n’était autre chose que de l’eau colorée.

« Le Passe-temps médical. »  Lyon, 1898.

A propos de sorciers

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Albert Anker
Albert Anker

Il faut bien qu’il y ait encore des gens qui croient à la magie ou à la sorcellerie, puisqu’on vient de juger à Lausanne un soi-disant magicien ou chercheur de trésors, qui réussissait à vivre de son métier, ou à peu près. Nous aimons à croire que les dupes du susdit personnage ont juré qu’on ne les y prendrait plus. Quoi qu’il en soit, et pour leur édification spéciale, nous leur donnons aujourd’hui quelques précieuses recettes, tirées d’un vieux manuel qui nous est tombé sous la main, et qui paraît avoir appartenu à un mège de village, autant dire à un sorcier. Les bonnes gens qui aiment les secrets infaillibles du Grand Albert, et qui ont encore en vénération le Grand grimoire et la Clavicule de Salomon, y trouveront certainement leur compte. Nous ne garantissons ni le style, ni l’efficacité de ces merveilleuses recettes. (L. Favrat.)

Pour faire revenir quelque chose qui a été dérobé, quand il y aurait six jours, prends une pièce de quatre sous, et tu la fendras en croix, mais qu’il n’y ait point de pièce séparée, et tu la porteras en bas à un moulin qui moud, sans dire mot à personne, ni en allant ni en revenant; et en le mettant dans le moulin tu diras :

Tiens, diable, que tu me fasses rendre ce que tu m’as fait dérober; et que le diable qui a emporté le larron et le larcin, t’emporte jusques à tant que tu me l’aies fait retourner. Ou bien, tu jetteras un cruche dans le moulin qui mout, sans dire mot à personne, que comme ci-dessus; qu’il ait la croix d’un côté et de l’autre, et tout le larcin reviendra, moyennant qu’il n’y ait que vingt-quatre heures que le larcin ait été fait. Mais tu feras trois signes de croix.

Pour faire danser tous ceux qui sont dans une chambre, prenez du trèfle ou triolet, et le mettre en poudre, et de cette poudre vous en mettrez sur la chandelle et en jetterez par la chambre.

Pour rendre le vin propre à boire, prenez deux fioles, remplissez l’une d’eau et l’autre de vin; mettez-les vis-à-vis l’une de l’autre, et bouchez-les toutes deux avec une cheville de bois de sureau, qui soit propre et qui joigne bien; que le vaisseau de l’eau soit dessus, celui du vin dessous, tous deux bouchés avec la même cheville; au bout de 6, ou 8, ou 14, ou 20, ou 24 heures, ou d’un certain temps, le vin se trouvera dessus et l’eau dessous; éprouvez le vin qui a fait ce voyage, il ne cause aucun mal à personne, et même les malades peuvent en boire tous les jours un peu.

Pour donner la joie à ceux qui sont en banquet, mettez tremper quatre feuilles de verveine en du vin, arroser le lieu où se fera le repas, et ils seront tous contents el joyeux.

Pour prendre les taupes du pré au mois de mai, prenez une taupe en vie, et la mettez dans un pot de terre avec un peu de soufre; allumez, enfouissez en terre jusqu’au col le dit pot, la taupe criera et toutes les autres viendront et tomberont au dit pot; mais il faut que ce soit la nuit.

Pour faire passer les verrues, frottez-les fermement avec un morceau de chair de boeuf, presque jusqu’au sang, et l’enterrez; à mesure que la chair pourrira, les verrues disparaîtront.

Le véritable remède pour les chutes, pour empêcher que le sang ne se caille : Buvez un jaune d’oeuf en du vinaigre, cela empêche le sang de se cailler.

Pour rougeur et inflammation des yeux : Il faut appliquer et lier fortement sur la nuque de la personne affligée de la racine de mauve cueillie quand le soleil est au signe de la Vierge.

Pour se battre avec un autre, il faut prendre de la racine à neuf chemises, du chardon bénit el de la racine ä l’ours, et coudre cela à la ceinture de ses chausses, et quand on voudra attaquer quelqu’un, on mangera trois fois, gros comme un pois, de la racine de grande pimprenelle, en faisant sur soi trois fois le signe de la croix, et il n’y aura jamais homme qui vous puisse faire tourment.

Pour empêcher chien de te mordre, porte avec toi la dent d’un chien noir.

Pour guérir la rage et morsure de chien enragé, dites ou faites dire ces mots : Han, pax, max. Ou bien portez sur vous ces mots pendus au col : Berber, careau, redeat.

« Le conteur vaudois : journal de la Suisse romande. » 1864.

Un remède d’enfer

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Un certain marquis de V… , connu par ses singularités, vantait à la Reine un remède dont lui seul avait le secret, et qu’il avait fait prendre à un de ses amis réduit à l’extrémité.

L’a-t-il guéri ? demanda la reine.

Madame, dès le lendemain, j’allai pour le voir, il était sorti. 

Comment sorti ?

Oui, madame; il était allé se faire enterrer à Saint-Sulpice.

« Paris, Versailles et les provinces au dix-huitième siècle. » Jean-Louis-Marie Du Gast de Bois-Saint-Just, Paris, 1817.