Führer

La T. S. F. et ses applications

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Le corbeau des ondes

fantomasRécemment, les habitants de la petite ville d’Oradea Mare en Transylvanie — ceux du moins qui possèdent la T. S. F. — étaient fort émus par des appels qui venaient les alerter régulièrement tous les soirs :

« Allô, allô! Ici Radio station clandestine d’Oradea Mare. Nous allons vous donner la chronique scandaleuse et secrète de votre cité. »

Après quoi, une heure durant, une voix d’homme alternant avec une voix de femme passait en revue les petits scandales de la ville. On se figure aisément la fureur des uns et la joie des autres. La police eut beau fouiller partout, le poste mystérieux resta introuvable. Puis un beau jour les émissions cessèrent aussi brusquement sans que l’on sût jamais quelle en était la provenance.

« Lectures pour tous. » Paris, janvier 1935.

Des nazis dans le placard

espionnageL’Allemagne hitlérienne a trouvé une application de la T. S. F. digne du Conseil des Dix à Venise, pour dépister ceux qu’on soupçonne d’être hostiles au Führer.

L’invention est fort simple : dans la maison ou l’appartement occupé par des suspects on introduit à leur insu un petit appareil ne mesurant pas plus de 18 centimètres carrés que l’on dépose n’importe où, dans le fond d’une armoire par exemple. Un appareil récepteur, dissimulé dans un camion spécialement aménagé, complète l’installation et permet à des policiers, cachés dans le camion qui se trouve à moins de 500 mètres de là, d’entendre et d’enregistrer les propos tenus dans la maison.

L’expérience a été tentée par le correspondant berlinois du Sunday Express. Dans le buffet d’une maison qu’il habitait, on plaça un de ces appareils « espions ». Le journaliste se mit à parler à mi voix et ses paroles furent fidèlement reproduites dans un camion.

Les murs ont des oreilles ! 

« Lectures pour tous. » Paris, janvier 1935.

Charlie Chaplin renoncera-t-il  à tourner Le Dictateur ? 

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charlot

Chaplin abandonne Le Dictateur… Telle est la nouvelle qui circule dans tous les studios de Hollywood depuis hier. On ne verra pas Charlot dans ce film que le monde entier attendait avec curiosité. 

Depuis neuf mois déjà, le film était en « gestation ». Chaplin, disait-on, veut présenter dans cette bande sensationnelle, une caricature du Führer de la plus grande Allemagne et stigmatiser à sa façon les exagérations et la vanité des séides qui appliquent sans discernement ses idées. Les menaces dont il fut l’objet depuis le jour où son projet fut connu, et probablement les protestations officieuses ou officielles du Troisième Reich, sont sans doute à l’origine de l’abandon du film en cours. 

Le personnage inventé cette fois par Chaplin était non pas exactement celui d’un dictateur, mais celui d’un petit israélite enfermé dans un camp de concentration. Comme il ressemble trait pour trait au Führer, des ennemis de ce dernier ourdissent un complot.  Ils enlèvent par surprise le dictateur et lui substituent le prisonnier. 

Son premier décret annonce la dissolution du parti nazi, celle des milices brunes et autres et la libération de ses frères de race. Mais la vie officielle d’un dictateur est fatigante. Surmené par les inaugurations, les exhibitions et les acclamations, l’Israélite de jadis regrette l’obscurité du camp de concentration. Mais une femme a compris son désarroi. Grâce à elle, il échappera à sa prison dorée, et l’aide, à s’enfuir en Suisse, où il redeviendra lui-même. 

L’abandon est-il définitif ? On sait que Charlie Chaplin est capricieux, tout autant que volontaire. On prétend ici que son abandon n’est peut-être pas tellement définitif et que, comme il n’a jamais manqué de courage, il se pourrait que, bravant les dangers et l’opinion, il présentera peut-être  Le Dictateur à l’écran au moment où on s’y attendra le moins. 

« Paris-soir. » Paris, 19/11/1938.