François 1er

Sur la dimension de la chevelure

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bunnyQui dira les révolutions que la longueur des cheveux a essuyées ! Tantôt on les a portés grands, tantôt courts, tantôt rasés entièrement.

En 1092, un grave évêque de Tournai attribua aux cheveux longs la peste qui sévit cette année-là. Il le persuada aisément à ses paroissiens et obtint d’eux qu’ils se dépouilleraient de cet ornement, auquel cependant ils paraissaient tenir beaucoup. Le clergé s’en mêlant, c’en eût peut-être été fini des cheveux longs pour bien longtemps, mais par malheur il y a cheveux longs et cheveux longs, comme il y a fagots et fagots. Or, parmi le clergé, on ne parvint pas à s’entendre sur cette grave question. C’est ainsi que tandis que les uns prescrivaient que les oreilles fussent entièrement découvertes, d’autres voulaient seulement qu’elles ne fussent pas totalement cachées. C’est ainsi encore que tandis qu’ici on tolérait les toupets, un peu plus loin l’ordre était que cette partie de la chevelure fût rasée. L’absence de règle fixe poussait à la controverse et, qui sait, peut-être celle-ci aurait tourné au schisme, lorsque Philippe-Auguste monta sur le trône.

Son goût prononcé pour les chevelures longues trancha la question en faveur de ces dernières. Et de fait, aussitôt après son avènement on n’en vit plus d’autres à la cour. Les ecclésiastiques eux-mêmes qui ne sont pas les derniers à saisir les goûts des princes et à les suivre, oublièrent les anathèmes prononcés contre cette mode et l’adoptèrent. Sous saint Louis, on coupa les cheveux en rond comme ceux des abbés du siècle dernier. Sous François 1er, un accident fit changer la mode.

« Dans mon jeune temps, dit Pasquier, au septième livre de ses recherches, nul n’était tondu fors les moines; advint par advertance que le roi, François, premier de ce nom, ayant été fortement blessé à la tête d’un tison, par le capitaine de Lorges, sieur de Montgomery, il ne porta plus longs cheveux; sur son exemple, les princes premièrement, puis les gentilshommes, et finalement tous les sujets se voulaient former; il n’y eut pas que les prêtres qui se missent de la partie, ce qui eût été auparavant trouvé de mauvaise exemple. »

Les calottes reprirent faveur avec les cheveux courts. On les porta et on introduisit une nouvelle manière de saluer. On ne savait pas anciennement ce que c’était que de rester la tête découverte devant ses supérieurs. Les seigneurs mêmes ne se découvraient pas devant le roi; ses officiers seuls étaient tête nue, sans manteau. Les grands ne se découvraient que lorsqu’il parlait.

La Sorbonne, en 1551, s’occupa de décider la question importante, si les sages maîtres et bacheliers devaient quitter leurs calottes avant de préparer leurs arguments, elle arrêta l’affirmative par une conclusion en forme. Cela ne se fit pas sans un peu de trouble, mais cette fois au moins, et contrairement à l’usage, le trouble ne passa pas l’enceinte des murs.

« La Mosaïque. » Paris, 1874.

Les premiers voleurs

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georges-de-la-tour

Entendons-nous bien, il ne s’agit point de clouer ici au pilori les premiers hommes qui pensèrent que le moyen le plus pratique pour se procurer quelque chose était le « larcin furtivement fait ». Il nous faudrait pour cela remonter à travers la nuit des temps, jusqu’aux origines de l’humanité. 

Nous voulons simplement parler des premiers mauvais garçons à qui on infligea le nom de voleurs. Cela ne remonte pas au delà du début du XVIe siècle. Jusque-là, on ne connaissait que des larrons, des pilleurs,  des coupe-bourse et des tire-laine : tels furent les compagnons de François Villon et les Coquillards. 

Quant au mot voleur, écrit le vieux Pasquier, l’ordonnance du roi François 1er faite contre eux nous enseigne l’origine, quand elle dit qu’il y avait de meschants hommes, lesquels faisaient semblant de voler l’oyseau, aguétoient des marchands sur les chemins; si cela n’est vray, il est bien trouvé. Ce texte est rappelé par M. Pierre Champion dans l’Envers de la Tapisserie qui nous apporte une documentation si précise sur les différents aspects de la vie publique et privée des Parisiens au temps de François 1er (Calmann-Levy). 

L’explication de Pasquier, qui séduisait encore Littré, est contredite par les étymologistes, gens redoutables, qui font venir le mot voler de vola, paume de la main. Ainsi, voler équivaudrait strictement à empaumer

Quoi qu’il en soit de cette question d’étymologie, c’est sous le règne de François 1er qu’apparurent les premiers « voleurs ». Ils étaient même si nombreux qu’en 1515 on dut créer au Parlement de Paris une Chambre criminelle distincte, connue sous le nom de Chambre de la Tournelle, car, disait le roi, les crimes et délictz qui ont pullulé, et encore de présent pullulent plus que jamais en nostre royaume n’ont esté corrigez ne pugniz

Nos voleurs, auxquels se mêlaient une foule d’aventuriers allemands et italiens, vivaient en véritables bandes de plusieurs centaines d’individus qui soutenaient, souvent victorieusement, de véritables combats rangés avec Le guet. Leur repaire était dans les bois qui avoisinaient le village du Bourget. Une grande rafle, le 28 janvier 1526, aboutit à cinq cents arrestations de malfaiteurs qui furent condamnés aux fers et galères. 

Comme les méfaits de ces voleurs, dont beaucoup étaient d’anciens soldats, se multipliaient, on se montra plus sévère. Le prévôt de Paris en fit pendre, étrangler ou brûler un bon nombre. 

Ces dernières sanctions furent encore insuffisantes pour assurer la sécurité des citoyens. Aussi, pour les brigands et meurtriers qui terrorisaient les bourgeois, une ordonnance du II janvier 1535, publiée à son de trompe, à tous les carrefours, prévit un nouveau supplice, importé sans doute des bords du Rhin : les coupables seraient liés sur la roue après avoir eu les membres cassés et y demeureraient vivants pour y faire pénitence tant et si longuement qu’il plaira à Notre Seigneur de l’y laisser, et morts jusques à ce qu’il soit ordonné par justice, afin de donner crainte, terreur et exemple à tous autres de ne choir, ne tomber en tels inconvénients et ne souffrir, n’endurer telles et semblables peines et tourments pour leurs crimes, délicts et maléfices. 

En dépit de ses rigueurs, François 1er fut obligé de constater qu’on continuait à piller et à détrousser de nuict les allans et venans, ès villes, villages et lieux de notre royaume. 

L’ordre ne fut guère rétabli, et encore provisoirement, que sous Henri II, qui, en 1549, enleva ces affaires à la compétence du Prévot pour les rendre à la juridiction des tribunaux ordinaires, Mais non plus que Louis XIII avec M. de Laffemas ou Louis XIV avec M. de la Reynie, les souverains de la Renaissance ne purent faire disparaître de Paris les mauvais garçons.

Et nous nous apercevons chaque jour, par la lecture des quotidiens, que nous n’en sommes pas encore débarrassés. 

Georges Mongredien.  » Les Nouvelles littéraires, artistiques et scientifiques. » Paris, 1936.
Peinture de Georges De la Tour.

Pour faire sourire la Joconde

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joconde

Se trouvant à Florence, vers 1500, Léonard de Vinci entreprit de faire le portrait de Mona Lisa, femme de Francesco del Giocondo. Mona Lisa était une très belle femme, et elle avait un sourire si particulier, si agréable ! il lui fallait croquer parfaitement ce sourire.

Enorme difficulté que Léonard parvint cependant à vaincre, grâce à un procédé qui ne manque pas d’originalité. Il entoura la belle Mona Lisa de musiciens, de chanteurs et de bouffons qui l’entretenaient dans une douce gaieté. Léonard travailla pendant quatre ans à l’exécution de ce tableau. On ne sait combien de temps musiciens, chanteurs et bouffons furent en réquisition.

Le sourire, admirablement reproduit, plut tellement au roi François 1er qu’il acquit l’oeuvre de Léonard de Vinci pour la somme de douze mille livres. Somme énorme pour l’époque; mais on tenait cette peinture pour une chose merveilleuse et s’accordait à déclarer que la figure de Mona Lisa était d’une exécution à faire reculer l’artiste le plus habile du monde qui voudrait l’imiter.

Ce portrait est connu sous le nom de la Joconde. Vous tous qui allez l’admirer au Musée du Louvre, inclinez-vous devant l’œuvre du Maître, mais ne refusez pas un souvenir aux musiciens, chanteurs et bouffons qui, entourant le chevalet de Léonard de Vinci, ont su provoquer le sourire de la Joconde.

« Le Pêle-mêle. » Paris, 1929.

Précision : Cet article ne présente ici qu’une hypothèse… parmi beaucoup d’autres plus ou moins farfelues.

La dot et le ventriloque

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ventriloqueBrabant, valet de chambre de François 1er, était pauvre, mais hardi… et ventriloque. Il désirait fort le mariage avec une belle et riche veuve; mais sans sou ni maille, comment réaliser une union aussi disproportionnée ? En vain, implora-t-il l’aide du Roi.

Je n’y puis rien, répliqua François Ier, mais si tu t’avises de quelque bon tour, je t’aiderai s’il y a lieu.

Brabant ne fut pas long à trouver l’expédient. La veuve avait pour tuteur un vieil oncle riche et avare, dont la fortune était d’assez mauvaise origine.

Il corrompit l’un des domestiques du vieux coquin, se cacha sous le lit de celui-ci, qui se réveilla affolé, aux sons d’une voix terrible qui lui reprochait ses larcins, ses usures et le reste :

Aussi vrai que je suis ta femme, concluait la voix d’en haut ou d’en bas, tu seras damné si tu ne fais d’abondantes aumônes ou quelques restitutions.

Le lendemain, le valet, bon drille, alla trouver l’avare, encore tout ému de l’alerte et lui demanda effrontément la main de sa nièce. L’avare se défendit un peu et soulagea sa conscience et sa bourse de cinq mille écus dans les mains largement tendues de Brabant.

Mais notre valet ne se tint pas pour content. Mis en goût par cet heureux commencement, il prétendait parfaire la somme, et s’adressa pour cela au Roi lui-même, avec la voix de Charles d’Angoulême, son père.

C’est au petit coucher, et caché derrière une tapisserie, qu’il essaya de jouer au fantôme une fois de plus. Le Roi le découvrit sans peine, lui donna du pied au derrière… et, non sans rire aux éclats, quelques cents écus qui complétèrent la dot.

« Magazine universel. »  Paris, 1903.