crucifix

Amour-propre

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prétentieux.

Un auteur a qualifié l’amour-propre, le plus grand de tous les flatteurs. Ou encore : amour de soi, qui peut, au cas échéant, tenir lieu de tout ce qu’on n’a pas.

« L’amour-propre, disait le célèbre théologien protestant Abbadie, entre essentiellement dans toutes les vertus. Une bonne action n’est qu’une manière de s’aimer, un amour-propre plus noble que les autres. »

L’amour-propre, a dit Voltaire, fort expert d’ailleurs en cette question, est semblable à l’avarice, il ne laisse rien traîner. L’une se baisse pour ramasser la plus misérable guenille, el l’autre le plus plat éloge.

Nul mortel, peut-être, ne porta la présomption et l’amour-propre plus loin qu’un certain Ségérus, professeur en l’Université de Wirtemberg. Il fit graver son portrait au-dessus d’un crucifix, avec cette inscription :

« Seigneur Jésus, m’aimez-vous ?« 

Et Jésus répondait :

« Oui, très illustre, très excellent, très docte seigneur Ségérus, poète couronné par sa majesté impériale, et très digne recteur de l’université de Wirtemberg, oui, je vous aime !« 

« Musée des familles. »  Charles Delagrave, 1897, Paris. 

Eclairage public

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Ludwik-de-Laveaux

C’est, dit-on, à la dévotion de Louise de Lorraine, femme d’Henri III, que nous devons l’origine de l’éclairage des rues de Paris.

Elle faisait placer à tous les carrefours et sur beaucoup de maisons des madones, des anges, des crucifix, devant lesquels on allumait d’abord des lampes et des chandelles que l’on plaça ensuite dans des lanternes. Ces lumières mises là avec une intention de piété rendaient des services et donnèrent l’idée d’éclairer régulièrement les rues alors mal gardées et périlleuses à parcourir.

On rapporte d’ailleurs que le pape Sixte-Quint employa le même expédient pour assurer aux rues de Rome un éclairage qu’on ne voulait point faire à  cause de la dépense.

« Musée des familles. »  Paris, 1896.
Illustration : Ludwik de Laveaux.

Histoire d’une damnée

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Apparition

Dans une ville du Pérou, une fille de seize ans, nommée Catherine, mourut tout à coup, chargée de péchés et coupable de sacrilèges

Du moment qu’elle eut expiré, son corps se trouva tellement infecté qu’on ne put le garder à la maison, et qu’il fallut le mettre en plein air pour le délivrer un peu de la mauvaise odeur. Aussitôt, on entendit des hurlements semblables à ceux de plusieurs chiens. Le cheval de la maison, auparavant fort doux, commença à ruer, à s’agiter, à frapper des pieds, et à chercher à rompre ses liens, comme si quelqu’un l’eût tourmenté et battu violemment. Quelques moments après un jeune homme qui était couché, et qui dormait tranquillement, fut tiré fortement par le bras et jeté hors de son lit. Le même jour une servante reçut un coup de pied sur l’épaule, sans voir qui le lui donnait et elle en garda la marque plusieurs semaines.

On attribua toutes ces choses à la méchanceté de la défunte Catherine, et on se hâta de l’enterrer, dans l’espérance qu’elle ne reviendrait plus. Mais au bout de quelques jours, on entendit un grand bruit, causé par des tuiles et des briques qui se cassaient. L’esprit entra invisiblement et en plein jour dans une chambre où était la maîtresse et tous les gens de la maison; il prit par le pied la même servante qu’il avait déjà frappée, et la traîna dans la chambre, à la vue de tout le monde, sans qu’on pût voir celui qui la maltraitait ainsi.

Cette pauvre fille, qui semblait être la victime de la défunte, allant le lendemain prendre quelques habits dans une chambre haute, aperçut Catherine, qui s’élevait sur la pointe de ses pieds pour attraper un vase posé sur une corniche. La fille se sauva aussitôt, mais le spectre s’étant emparé du vase la poursuivit et le lui jeta avec force. La maîtresse ayant entendu le coup accourut, vit la servante toute tremblante, le vase cassé en mille pièces, et reçut pour sa part un coup de brique qui ne lui fit heureusement aucun mal.

Le lendemain, la famille étant rassemblée, on vit un crucifix, solidement attaché contre le mur, se détacher comme si quelqu’un l’eut arraché avec violence, et se briser en trois morceaux. On prit le parti de faire exorciser l’esprit, qui continua longtemps ses méchancetés, et dont on eût beaucoup de peine à se débarrasser.

 » Infernaliana  »   Charles Nodier, Ed. Sanson, Paris, 1822.