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La bouillie des chanoines

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Un fait assez singulier se passait, le mardi de Pâques de chaque année, dans la ville de Rennes. Madame Barreau, ci-devant de Girac, est abbesse de Saint Georges, communauté située dans ladite Ville.

Cette abbaye a, de temps immémorial, le droit suivant sur les chanoines de la cathédrale. Ils sont obligés de venir processionnellement chanter la grande messe le mardi de Pâques à l’abbaye, sous peine d’une amende considérable. Mais en revanche, l’abbesse est obligée, après la cérémonie, de faire entrer dans une des cours de l’intérieur du couvent, chanoines, dignitaires, bas-choeur, musiciens, chantres etc., et là, de leur donner une ample ration de bouillie et de sucre. Ce qu’il y a de plus original, c’est que la bouillie doit être urcée  (c’est-à-dite un peu brûlée), ce que le grand chantre vérifie, en trempant son index dans le grand bassin. Après l’examen du gourmet, les religieuses distribuent la bouillie à chacun des assistants, et se rangent debout d’un côté, tandis que ceux-ci sont occupés à manger de l’autre.

La cérémonie faite, les chanoines s’en retournent, dans le même ordre qu’ils sont venus , avec la seule différence que beaucoup de ces messieurs emportent chez eux des écuelles pleines de bouillie, de manière que d’une main, ils tiennent l’aumusse et le basson, et de l’autre, leur bouillie.

J’atteste la vérité de ce fait, comme témoin oculaire, car, voulant m’en assurer l’année dernière, je trouvai le moyen de me faufiler avec quelques amis, tandis que le chapitre entrait. Notre dessein était d’enlever la bouillie de ces messieurs, et de la porter aux Ecoles de droit. Mais comme nous n’étions que trois, nous ne pûmes exécuter ce projer. Nous nous contentâmes d’assister au repas auquel deux de nous prirent part, en se faisant passer pour musiciens.

Il est étonnant que des droits pareils aient subsistés dans le dix-huitième siècle. Mais depuis la suppression des chanoines, le repas n’aura plus lieu, faute de convives.

« Almanach littéraire ou Etrennes d’Apollon. »  Paris, 1792.
Illustration : damien chavanat.

La poste à Paris en 1653

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Tous ces jours-ci, les journaux enregistrent des plaintes contre la difficulté et les lenteurs postales à Paris où l’on a pourtant des tubes pneumatiques et des téléphones. Il n’est pas sans intérêt à ce sujet de signaler un règlement sur la poste parisienne de 1653. Paris était alors réputé comme la ville la mieux organisée de l’Europe sous ce rapport.

Le règlement vise les lettres écrites d’un quartier de Paris à un autre avec une réponse payée que le facteur rapportait à la personne qui avait écrit. On attachait à la lettre un billet de retour. Un commis apportait la lettre à destination, attendait la réponse et la rendait au premier expéditeur. Le prix de ces billets avec retour port payé était d’un sou marqué; on les vendait au palais, bureau du commis général, chez les tourières des couvents, chez les portiers des collèges et communautés et chez les geôliers des prisons.  

Le règlement du 8 août 1653 porte: « Les solliciteurs sont avertis de donner quelque nombre de ces billets à leurs procureurs et à leurs clercs, afin qu’ils les puissent informer à tous moments de l’état de leurs affaires, et les pères à leurs enfants qui sont au collège ou en religion, et les bourgeois à leurs artisans. »

Voilà un genre de lettres qui n’existe plus aujourd’hui, mais qu’on devrait bien rétablir. Ce serait assurément un progrès d’en revenir à 1653 sur ce point.

 « Gazette anecdotique, littéraire, artistique et bibliographique. »  Paris, 1892.

Candeur virginale

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Nul n’est exempt de parasites, même les saintes personnes qui vivent emmurées dans un couvent. Témoin soeur Tècle, jeune novice, à l’âme pure, mais au corps souillé par la présence d’un hôte incommode qui s’était incarné en elle, l’immonde taenia solium.

L’expulsion fut décidée et, en qualité d’exorciste, fut mandé le vieux docteur, lequel ordonna une préparation à base de kousso. Vains efforts, quelques cucurbitains seuls firent preuve de bonne volonté en vidant (métaphore) les lieux. En dernier ressort, l’homme de la science déclara à la nonnette qu’il lui fallait avoir recours à la fougère mâle.

Terreur et rubéfaction de la sainte fille :

De la fougère mâle… Grand Dieu… Enfin, je demanderai une dispense.

« Le Passe-temps médical : journal des curiosités médicales. » Lyon, 1899.

Une religieuse au volant

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S’il est assez fréquent, aujourd’hui, de voir des femmes tenir le volant d’une automobile, on n’avait jamais rencontré, en France du moins, de religieuses faisant cet office.

Or, dans un couvent de femmes, à Pau, est une religieuse qui conduit la camionnette chargée de faire les provisions à la campagne.

Entrée au couvent, comme novice, cette religieuse montra de telles qualités d’énergie et de décision, que la supérieure lui fit suivre un cours de mécanicien-chauffeur, elle lui confia ensuite le soin de conduire la voiture que venait d’acheter le couvent.

La chauffeuse en cornette s’acquitte à merveille de ses fonctions, et elle conduit sa camionnette avec une telle dextérité qu’elle n’a pas encore, paraît-il, écrasé le moindre poulet.

« La Revue limousine : revue régionale. »  Limoges, 1927.
Illustration :  » Le gendarme de Saint-Tropez » de Jean Girault.  France Rumilly et Louis de Funès. capture YouTube.

Changement de condition

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Passant à Saint-Denis, raconte  Madame de Genlis, j’entrai avec émotion dans le couvent des Carmélites, où une princesse, la fille d’un roi de France, (Louis XV) venait de s’enfermer pour toujours. Je demandai à la voir… Madame Louise permit les questions et y répondit brièvement, mais avec bonté. Je lui demandai quelle était la chose à laquelle, dans son nouvel état, elle avait ou le plus de peine à s’accoutumer.

« — Vous ne le devineriez jamais, m’a-t-elle répondu en souriant : c’est à descendre seule au petit escalier. Dans les commencements c’était pour moi comme un précipice effrayant. J’étais obligée de m’asseoir sur les marches, et de me traîner pour descendre. »

En effet, une princesse qui n’avait jamais descendu que le grand escalier de marbre de Versailles, en s’appuyant sur le bras de son chevalier d’honneur, et entourée de ses pages, a dû frémir en se trouvant livrée à elle-même, sur les bords d’un escalier bien haut, bien raide, et formé en colimaçon.

« Musée des familles. »  Charles Delagrave, Paris, 1897.

Les pénitentes

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Charles VIII, par lettre du 14 septembre 1496, confirma cet établissement, qui fut en dernier lieu transféré au monastère de Saint- Magloire, rue Saint-Denis.

Les filles, pour être admises dans ce couvent, étaient tenues de faire des preuves suffisantes de leur libertinage, d’affirmer par serment prêté sur les saints évangiles , en présence du confesseur et de six personnes, qu’elles avaient mené une vie dissolue. On était fort rigide sur cette preuve. Il arrivait que des filles se prostituaient exprès pour avoir droit d’entrer dans cette communauté. Lorsque ce fait était reconnu, on les chassait honteusement de la maison.

Il arrivait aussi que des filles, à la suggestion de leurs parents qui voulaient s’en débarrasser, se présentaient en protestant et jurant qu’elles avaient vécu dans la débauche, tandis qu’elles étaient encore vierges. Cette singulière tromperie détermina les religieuses à vérifier le fait et à ne point s’en rapporter au serment des aspirantes. Toutes les filles, alors en présence des mères, sous-mères et discrètes, et par des matrones nommées exprès, furent soumises à une scrupuleuse visite.

« Vous savez, porte un article du règlement, qu’aucunes sont venues à vous qui étaient vierges et bonnes pucelles, et telles ont été par vous trouvées, combien qu’à la suggestion de leur père et mère, qui ne demandaient qu’à s’en défaire, elles eussent affirmé être corrompues. »

Ainsi, après la visite, si la postulante était trouvée vierge, on la renvoyait comme indigne d’entrer dans ce couvent.

« Singularités historiques. »  Jacques-Antoine Dulaure, Baudouin frères, Paris, 1825.