cinéma

Les costumes  de Lon Chaney 

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Lorsque Lon Chaney a besoin d’un costume usagé pour tourner un film où il représente un vagabond ou un personnage dans la misère, il ne veut pas revêtir un habit ayant appartenu à un miséreux. Il préfère acheter un costume neuf qu’il fait vieillir.

Cette opération n’est pas si commode qu’on peut le croire. On commence par laver le costume au savon une douzaine de fois. Après chaque lavage on le fait sécher au soleil. L’étoffe s’abîme vite et prend des teintes jaunâtres. Puis Lon Chaney confie le vêtement à un automobiliste qui l’attache au bout d’une corde à l’arrière de sa machine. On roule pendant plusieurs kilomètres. Le résultat est que le veston et le pantalon soumis à un tel régime, ne tardent pas à se déformer, à se trouer.

La garde-robe de Lon Chaney en contient plusieurs qui paraissent avoir été portés pendant des années par de pauvres diables tant ils sont lamentables.

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Superstitions en studio

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On a souvent dit que les gens de théâtre étaient plus superstitieux que quiconque. Cela s’explique aussi facilement que le trac. Le fait de se présenter devant un public implique toujours, quel que soit le talent d’un artiste, une part de risque que, malgré lui, et  presque inconsciemment, il essaiera toujours de diminuer par des pratiques rituelles. Pratiques défensives plus qu’offensives.

Les acteurs de cinéma, et même les comédiens qui abordent le studio ont des nerfs moins sensibles. C’est sans doute parce qu’ils n’ont pas de contact direct, à la fois délicieux et redoutable, avec le public. Un geste, une intonation sont-ils mauvais ? Il suffit de tourner la scène une fois de plus. Considérable au théâtre, le facteur « hasard » se débilite à l’éclat des sunlights. Et l’on prend l’habitude de le braver avec beaucoup moins de précautions.

Non seulement je ne suis pas superstitieux, disait un jour Charles Vanel, mais je trouve ça idiot chez les autres. Et je suis très content lorsque quelqu’un allume trois cigarettes avec la même allumette.
— Je n’aime pas beaucoup évidemment qu’on prononce le mot « poisse », reconnaît Henri Roussel, en passant la main sur le dos d’une chaise, mais je n’ai jamais constaté que ça ait une influence mauvaise.
— Non, pas du tout superstitieuse, assure Florelle.
— Des blagues, prétend Odette Talazac
— Donnez-moi un joli rôle un vendredi 13, je le prendrai quand même, précise Simone Simon.
— Ma fille n’aime pas les chapeaux sur les lits, ni les parapluies ouverts dans les maisons, avoue la maman d’Annabella. Mais je crois que c’est tout simplement parce qu’elle aime l’ordre et qu’elle a horreur de l’odeur de la soie mouillée.
— Il m’est très désagréable qu’on parle à l’avance du succès d’un film, dit Mme Jeanne Fusier. Appelez-vous ça de la superstition ? Ou n’est-ce que de la prudence ?

André Roanne, Henri Garat, Roger Tréville sont des hommes forts. Ils n’usent, eux non plus, d’aucun truc vis-à-vis de la chance. Elle ne les a pas boudés quand même ! Le metteur en scène Tourjansky n’aime pas que l’on siffle dans un studio, mais tout le monde sait que ça ne doit se faire que dans une écurie. Il existe à ce sujet une très jolie histoire marseillaise.

Pour qu’une exception vienne confirmer la règle, une de nos plus jolies vedettes du cinéma français est, elle, effroyablement superstitieuse : c’est Simone Cerdan.

Mais certainement, je le suis… Pour rien au monde je ne porterais une robe verte. Et pourtant, le vert me va très bien… Et tourner dans un décor où il y a des poissons peints ? Quelle horreur ! Ça me couperait tous mes effets ! Je vous assure, ça porte malheur… C’est très sérieux !

Le compositeur Roland-Manuel, qui a écrit la musique de nombreux films, résumait d’une façon fort élégante l’état actuel de la question :

C’est évident, on est de moins en moins superstitieux, mais on le reste quand même, par politesse. Je n’inviterais pas treize personnes à dîner, parce que l’une d’elles pourrait en être désagréablement affectée. Je ne vous donnerais pas du feu avec une allumette qui aura servi déjà deux fois, parce que cela pourrait vous être désagréable. Je crois que nous évitons ainsi, machinalement, beaucoup de petits gestes auxquels nous n’accordons plus aucune signification maléfique, simplement parce que « ça ne se fait pas »… Toutes nos habitudes de politesse n’ont-elles pas aujourd’hui un sens bien détourné de leur origine ? Lorsque vous inclinez la tête devant quelqu’un, vous souvenez-vous que, jadis, les captifs signalaient ainsi leur humilité et leur faiblesse, en offrant la leur à couper ?
— Cela ne fait rien, reprit Simone Cerdan, en vérifiant dans une glace l’état de son maquillage, vous ne me ferez pas porter une robe verte !…

Sarreau de Maynard, Dans L’Intransigeant du 26 février 1932.  12

Système D

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Comme un journaliste lui posait quelques questions à propos du film Cléopâtre, Claudette Colbert, la charmante vedette d’Hollywood, contait une amusante anecdote.

Au cours de la réalisation de cette production, Claudette Colbert entend le dialogue suivant entre un débutant naïf et un vieux comédien pince-sans-rire. Le débutant devait dire, dans une scène du film : « Il sera bientôt midi. »

A ce moment, il demande au vieux comédien :

Comment sais-je qu’il est midi ?…

A l’époque de Cléopâtre, les montres n’existaient pas, évidemment.

Notre metteur en scène vient de poser la même question, répondit le vieux comédien, et a trouvé une solution. Tu diras à un esclave : « — Allez me chercher le cadran solaire. » et quand il l’apportera, tu constateras : « — Il sera bientôt midi. »

Le salaire de David

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Les animaux féroces utilisés dans les scènes cinématographiques sont généralement apprivoisés. David, léopard employé par une compagnie américaine, à Los Angeles, devenant un danger pour les artistes du ciné, sa mort a été résolue.

Pour éviter d’abîmer sa merveilleuse fourrure, l’électrocution a été employée. Une plaque d’acier étant glissée dans la cage, une patte du condamné fut reliée, par un fil, à un appareil électrique. Un courant de 6.000 volts a eu instantanément raison de l’animal sans détériorer sa belle peau.

« Le Miroir. »Paris, 1920.

Snobisme

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Une des principales vertus du snobisme est l’émulation qu’il prodigue à toutes les personnes qui veulent conquérir une place qu’elles n’ont pas. Montmartre, qui, tout de même après un dîner au Café de Paris, est le cabaret où se croisent les étoiles de la rampe, de l’écran et des salons, a été, la semaine passée, le théâtre d’un demi-scandale.

Chaque table était occupée par des figures connues, Gloria Swanson, Lucienne Boyer, Joséphine Baker, Jeanette Mac Donald que saluèrent d’affectueuses ovations. Le public insista pour que Joséphine Baker exécutât un tour de chant… gratuit. Souriante, celle-ci ne se fit pas prier. Son succès fut énorme et, pour la remercier, des dames lui offrirent un gros bouquet de violettes, que la vedette du Casino de Paris partagea spontanément entre les danseuses du French Cancan. N’est-ce pas là le geste d une véritable étoile et mieux encore celui d’une femme de cœur ?

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Par contre Jeanette Mac Donald qu’on réclama longtemps à son tour, demeura rigide dans sa dignité d’altesse de cinéma, et ne répondit ni par un salut ni même par un sourire, à tel point qu’un « hou » réprobateur succéda bientôt aux cris de « Jeanette ».

La petite Américaine n’a pas encore la manière.

« Marianne : grand hebdomadaire littéraire. »  Paris, 1933.

Les adieux du film américain

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Oui, mais, si l’Amérique ne fait plus que du film parlant, la France s’est-elle mise à en faire ? Non !

La raison même pour laquelle l’Amérique a rompu avec la France sur la question du contingentement est qu’elle n’a plus rien à tirer du marché français et que le film parlant américain n’a pas de débouchés possibles ici puisque les acteurs parlent anglais.

L’Amérique peut amortir le film parlant chez elle. Nous n’étions qu’un petit appoint pour elle, avec le film muet. Cet appoint disparaît, et il reste d’ailleurs à l’Amérique le marché de Londres. Le film parlant y affole déjà les directeurs de théâtre par sa concurrence formidable.

Le film américain nous quitte. Bon voyage !

Seulement, qu’est-ce que nos écrans vont avoir à se mettre sous la dent cet hiver ?

Nous ne faisons pas du tout de films parlants, et nous ne ferons que peu de films muets dont beaucoup témoignent de l’impécuniosité des fabricants.

N’échapperons-nous à la domination américaine que pour tomber sous la domination allemande ?

« Les Potins de Paris : politiques, financiers, théâtraux. »  Paris, 1929.
Photo : Agence Meurisse.