cérémonie

Petit problème juridique

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mariageEst-il nécessaire, pour célébrer valablement un mariage, d’avoir au préalable revêtu la classique redingote ? A défaut même de veston, peut-on procéder à cette cérémonie, lorsqu’on porte jupons… et pour cause ? La question vient d’être posée aux environs
de Mende d’assez comique façon. 

On sait (ou, du moins, il faut d’abord savoir) qu’à Rieufort-de-Randon, gros bourg du département de la Lozère, le maire a été tout récemment révoqué de ses fonctions et que l’adjoint est démissionnaire. Par suite de ces incidents, les fonctions de premier magistrat de la commune ont été dévolues à M. Pons, conseiller municipal, dont l’instruction est des plus rudimentaires. Or, celui-ci, ayant à célébrer un mariage, refusa de procéder aux formalités d’usage, sous prétexte qu’il ne savait pas lire et manquait d’expérience. 

Grand émoi dans l’auditoire et cruelle déception des futurs époux. Allait-on se trouver obligé de s’en retourner comme on était venu ? Le festin de noce, tout prêt, devrait-il être renvoyé ? C’est ce que ne voulut pas Mlle Daudé, fille du maire révoqué, qui remplissait les fonctions de secrétaire de mairie. Sans embarras aucun, elle posa les questions  d’usage, donna lecture des articles du Code civil, prononça la formule sacramentelle,  bref, fit tout ce qu’aurait dû faire le conseiller-maire, si bien que la cérémonie s’accomplit et que les désirs de chacun parurent ainsi réalisés. 

Mais ici intervient la loi, qui avait négligé de prévoir le cas. On demande, maintenant, si un mariage célébré dans de telles conditions est valable. La plupart des chroniqueurs qui se sont occupés de la question estiment qu’il est nul. En aucun cas, en effet, le secrétaire de la mairie, fût-il du sexe gracieux, ne saurait avoir la capacité d’officier de l’état civil.  Pour être valable, le mariage doit être célébré par le maire, l’adjoint délégué ou le  conseiller municipal désigné au rôle. Pour le cas des époux de Rieufort, il y a eu incompétence de l’officier public; donc, nullité, et le tribunal de Mende va, sans doute, être saisi par le Parquet. 

Le tribunal de la Seine dut s’occuper, il y a quelques années, d’une affaire qui fit grand bruit à l’époque pour son étrangeté, et qu’on a appelée « l’affaire des mariés de Montrouge ». 

Six mariages avaient été célébrés à la mairie de Montrouge par un conseiller municipal qui n’était pas celui régulièrement désigné au tableau de roulement. Le procureur de la République saisit le tribunal civil, qui prononça l’annulation des six mariages, « non pour incompétence de l’officier public (c’était, en effet, un conseiller municipal), mais pour défaut absolu de qualité et de pouvoir en sa personne ». 

L’arrêt, d’ailleurs, fut corrigé par la Cour de cassation, qui estima valides les mariages en raison de la commune erreur de tous ceux, marieur et mariés, qui avaient participé à leur célébration. 

Mais ce qu’il y eut de plus drôle, dans toute cette affaire, c’est que, prenant fait de la décision du tribunal qui annulait les mariages, et sans attendre la sentence des juges suprêmes, cinq des maris intéressés revinrent, avec leur femme, faire légitimer leur union. Le sixième ne revint pas. 

Fût-il le plus négligent ou le plus sage ?… 

« Les Annales. » Paris, 1905.

Le mort qui suit son cercueil

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camille-martinIl y a quelque temps, les parents d’un riche fermier de l’Illinois, Stéphan Patten, âgé de 80 ans et vivant seul, reçurent une lettre leur annonçant la mort de l’octogénaire. 

Ils vinrent nombreux pour assister aux obsèques, au cours desquelles ils remarquèrent un vieillard inconnu d’eux. Au moment de la descente de la bière dans le caveau, la cérémonie fut arrêtée par l’apparition de Patten lui-même qui déclara aux assistants que les conversations entendues par lui l’avaient édifié sur le compte de certains de ses héritiers.

Il s’en alla en remerciant l’assistance…        enterrement

« Les Echos de Damas. » 1931.
Peinture de Camille Martin.

La bouillie des chanoines

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moines

Un fait assez singulier se passait, le mardi de Pâques de chaque année, dans la ville de Rennes. Madame Barreau, ci-devant de Girac, est abbesse de Saint Georges, communauté située dans ladite Ville.

Cette abbaye a, de temps immémorial, le droit suivant sur les chanoines de la cathédrale. Ils sont obligés de venir processionnellement chanter la grande messe le mardi de Pâques à l’abbaye, sous peine d’une amende considérable. Mais en revanche, l’abbesse est obligée, après la cérémonie, de faire entrer dans une des cours de l’intérieur du couvent, chanoines, dignitaires, bas-choeur, musiciens, chantres etc., et là, de leur donner une ample ration de bouillie et de sucre. Ce qu’il y a de plus original, c’est que la bouillie doit être urcée  (c’est-à-dite un peu brûlée), ce que le grand chantre vérifie, en trempant son index dans le grand bassin. Après l’examen du gourmet, les religieuses distribuent la bouillie à chacun des assistants, et se rangent debout d’un côté, tandis que ceux-ci sont occupés à manger de l’autre.

La cérémonie faite, les chanoines s’en retournent, dans le même ordre qu’ils sont venus , avec la seule différence que beaucoup de ces messieurs emportent chez eux des écuelles pleines de bouillie, de manière que d’une main, ils tiennent l’aumusse et le basson, et de l’autre, leur bouillie.

J’atteste la vérité de ce fait, comme témoin oculaire, car, voulant m’en assurer l’année dernière, je trouvai le moyen de me faufiler avec quelques amis, tandis que le chapitre entrait. Notre dessein était d’enlever la bouillie de ces messieurs, et de la porter aux Ecoles de droit. Mais comme nous n’étions que trois, nous ne pûmes exécuter ce projer. Nous nous contentâmes d’assister au repas auquel deux de nous prirent part, en se faisant passer pour musiciens.

Il est étonnant que des droits pareils aient subsistés dans le dix-huitième siècle. Mais depuis la suppression des chanoines, le repas n’aura plus lieu, faute de convives.

« Almanach littéraire ou Etrennes d’Apollon. »  Paris, 1792.
Illustration : damien chavanat.

Discipline militaire

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tour-de-londres

Le public ne connaît qu’imparfaitement les règles de la discipline militaire auxquelles sont soumises les troupes casernées à la Tour de Londres. Une cérémonie plaisante est celle qui a lieu tous les soirs pour la fermeture des portes.

Le gardien, les clefs en main , se met en marche accompagné de douze hommes commandés par un sergent et un caporal. Chaque sentinelle, comme il est d’usage, crie :     

— Qui vive ?
Le gardien répond :
les clefs !
Quelles clefs ?
Les clefs de la reine Victoria.
Clefs de la reine Victoria, passez ! dit la sentinelle.

L’escorte continue sa route.

A Spurgate, le sergent et son escorte s’alignent et saluent les chefs en présentant les armes. Le gardien se découvre respectueusement et s’écrie :

Dieu bénisse les clefs de la reine Victoria  !
Amen! répond la garde.

La cérémonie se termine là.

Il y a quelque temps un grenadier écossais schismatique fut jeté au cachot, et y resta trois jours, parce qu’il avait refusé de prendre part à la prière. Le soldat disait pour se justifier qu’il voulait bien bénir la reine de tout son cœur , mais que sa conscience ne lui permettait pas de bénir les clefs de la Tour.

« Le Crime : almanach des cours d’assises pour l’année 1846. » Hinzelin et Cie, Nancy, 1846.

Dévotion modérée

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Gedeon-Tallemant-des-Réaux.

Gédéon Tallemant des Réaux rapporte de sa première période épiscopale une anecdote qui ne le montre pas confit en dévotion.

Visitant un monastère de Carmélites où la supérieure faisait des difficultés pour lever son voile, il lui dit quand elle s’y fut décidée et  qu’elle lui eut découvert un visage fort jaune:  

Vrayment, ma mère, il falloit bien faire tant de cérémonie pour monstrer ce visage d’omelette ! Baissez, baissez votre voile !

Et il lui tourna le dos.

« Académie des sciences morales et politiques. » Paris, 1893.

Une cérémonie qui disparait

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couple-alsacienIl y a quelques jours, M. Emile Labiche, rapporteur de la commission chargée d’examiner le projet de réforme de la loi relative au divorce, a déposé son rapport sur le bureau du Sénat. Parmi les réformes contenues dans ce projet, il y a lieu de signaler celle relative à la suppression de la « cérémonie de la consécration du divorce ».

On sait, en effet, que, depuis le jour où M. Naquet a fait réintégrer dans le Code cette mesure libératrice, on avait rétabli, en même temps, certains articles de la loi de l’an IX, et notamment celui relatif à la consécration.

Dans les deux mois qui suivaient le jugement, l’époux au bénéfice duquel il avait été prononcé devait appeler son conjoint devant l’officier de l’état civil de l’arrondissement habité par lui et là, en présence de quatre témoins, le maire « consacrait » le divorce.

Si cette suprême formalité était négligée, la sentence prononcée par le tribunal devenait nulle et les époux, pour se séparer de nouveau, devaient invoquer des motifs autres que ceux qu’ils avaient présentés lors du premier procès !

Cependant, si la formalité n’était pas omise, savez-vous ce qui se passait la plupart du temps ? L’époux condamné (n’y étant pas obligé)  ne se présentait pas; mais la « cérémonie » s’accomplissait quand, même avec l’assistance du marchand de vin et du commissionnaire du coin, qu’on allait requérir pour remplacer les deux témoins de la partie absente.

Dans les cas de séparation pour incompatibilité d’humeur, les deux époux, étaient présents, mais, trop souvent, hélas! ils mettaient largement à profit leur dernière entrevue pour se dire des choses fort désagréables, sans se soucier de la présence du maire, qui devait présider quand même à cette prise de bec in extremis.

Pour les adultères, c’était bien autre chose ! Neuf fois sur dix le mari voyait arriver son ex-épouse, pimpante et railleuse au bras du « motif » du divorce. Aussi, souvent la vue de l’écharpe tricolore n’en imposait pas assez au mari, qui tombait à coups de poing sur le « malheur de sa vie » ! Et le maire présidait toujours !

Si on réfléchit que cette « cérémonie » avait lieu dans la salle des mariages, où quelquefois un ou plusieurs couples futurs, flanqués de leurs parents et amis, attendaient que l’officier de l’état civil eût terminé pour procéder à leur mariage, on n’a pas de peine à apercevoir les inconvénients de ce qu’on appelle pompeusement la « cérémonie de la consécration du divorce ».

Aussi est-ce en considération de ces faits que la cérémonie de la consécration du divorce va probablement disparaître. On se contentera d’envoyer à la mairie la signification du jugement; l’officier de l’état civil procédera simplement à l’enregistrement du divorce en marge de l’acte de mariage, et les « disjoints » n’auront plus à redouter une entrevue pénible.

Et dire qu’on avait institué la « cérémonie » en question comme tentative suprême de réconciliation !

La Revue des journaux et des livres.   Edmond Roland, Paris,1885.