Beethoven

Le crâne de Beethoven

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beethovenUne maison viennoise avait envoyé à des amateurs de musique une circulaire ainsi conçue : 

« Nous avons l’honneur de vous informer qu’à l’occasion du 140e anniversaire de la naissance de Beethoven, notre maison a obtenu la permission de fabriquer des moules du crâne exhumé du maître. Ces moules, en plâtre, sont exécutés par un artiste viennois. Nous espérons vous compter parmi nos clients et vous prions de bien vouloir nous dire si vous désirez recevoir le crâne contre remboursement. » 

Le crâne de Beethoven contre remboursement !… 

Illustration : Silhouette de Beethoven au piano (par Schlipmann), © Getty / DEA/A. DAGLI ORTI/ Collection De Agostini.

Persona non grata

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ingres
Jean-Auguste-Dominique Ingres

Stendhal, voyageant en Italie, s’arrêta à Rome et fut reçu à la Villa Médicis.

Au cours de la soirée, Ingres parla naturellement musique avec son hôte qui se hasarda à dire qu’il n’ y avait pas de chant dans Beethoven. 

Ingres, surpris, interrompit brusquement la conversation. Il descendit ensuite chez le portier de la Villa, et lui montrant Stendhal, ajouta :

« Je n’y serai jamais pour ce monsieur ! »

Ludwig, grosse filou !

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Au printemps de 1821, alors qu’il était en villégiature à Baden, Beethoven se présenta un jour chez le conseiller municipal Johann Bayer pour louer deux pièces. 

Celui-ci remarqua que Beethoven était sans chapeau, mais avant qu’il ait pu lui en faire l’observation (il connaissait le compositeur) un agent de police et un garçon de restaurant firent irruption et conduisirent Beethoven au poste. Là, tout s’expliqua. 

Le musicien était parti du restaurant. en oubliant son chapeau, mais en oubliant aussi, bien involontairement, de régler son addition.

La Symphonie inachevée

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La musique est une bien belle chose… quand elle est vraiment de la musique. Le dictionnaire Larousse vous apprendra que le mot « musique » représente l’art de combiner les sons d’une manière agréable à l’oreille… Mais nous pensons que cette définition ne suffit pas. La musique doit plaire aussi à notre esprit. Elle doit nous égayer ou nous émouvoir. Elle doit demeurer intelligible à notre âme, et c’est pourquoi il faut penser qu’il existe peu de belle musique et très peu de grands musiciens. S’il y a une multitude de compositeurs de musique, il y a très peu de génies, et c’est pourquoi devant des noms comme Beethoven, Mozart, Schubert, doit-on méditer profondément avec la curiosité de ces esprits impérissables, magiciens de l’harmonie. Leur œuvre parle à nos cœurs. 

Avez-vous remarqué combien peu de morceaux répondent à leurs titres ? Des compositeurs prétentieux intitulent leurs œuvres avec cérémonie : « Coucher de soleil », « Feuilles d’automne », « Matin d’avril », ou « Songe d’été », sans que rien, dans les sons par eux juxtaposés ne réponde à ces titres, et d’ailleurs si, jouant ces morceaux, vous demandiez aux auditeurs : « Que signifie cela ? » je gage qu’aucun ne répondrait. Cela c’est souvent du bruit, du bruit assez agréable, mais qui ressemble surtout à un ragoût de réminiscences où les opéras et les chansons d’autrefois apparaissent par lambeaux mal cousus. 

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En revanche, quand vous entendez le « Printemps », de Grieg, vraiment vous « voyez » le printemps. Quand vous entendez « Rêve de valse », vous imaginez la valse et son rêve… Et c’est pourquoi  les musiciens véritables ont toujours donné à leurs œuvres le titre véritable, le titre vrai, titre souvent réduit à un numéro de symphonie ou de sonate. Schubert a donné à sa Symphonie inachevée son titre normal. Cette Symphonie inachevée a son histoire. 

La Symphonie inachevée (symphonie en si mineur), correspond à un émouvant épisode de la vie sensible et si courte de Franz Schubert. Cette œuvre admirable entre toutes, faite de grâce et de pureté, de poésie et d’amour, suffirait à mériter à Schubert le titre d’Archange de la musique. En voici l’origine extraordinaire : 

Aux environs de Vienne, un jeune musicien de talent,, mène l’existence modeste d’un instituteur. Il faut bien vivre. Doux et rêveur, Franz Schubert s’applique de son mieux à instruire ses jeunes élèves, mais son génie submerge ses pensées de flots d’harmonie et il lui arrive, au tableau noir, de terminer une explication sur l’arithmétique en écrivant non plus des chiffres, mais des notes jaillies éperdument sur une portée tracée à la craie dans un geste d’ivresse. Les enfants, qui ne peuvent pas comprendre, en rient et se moquent. Ils le font souvent enrager, mais le plus grave est que le directeur de l’école surprend Schubert, au cours d’un de ces déraillements qui jettent malgré lui son esprit sur sa voie véritable, voie qui mène au pays du charme. 

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Franz Schubert risque ainsi à chaque instant de perdre sa situation, bien humble pourtant, puisqu’il doit souvent recourir à un prêteur sur gages, chez qui il engage avec beaucoup de tristesse, jusqu’à sa guitare, pour payer son loyer, car les éditeurs de musique ne lui viennent guère en aide. 

De la sorte, il fait la connaissance d’une ravissante jeune fille, éperdue d’admiration pour lui et qui n’est autre que la fille du prêteur. 

Cependant, la renommée de Franz Schubert, dont tout le pays chante déjà les délicieuses mélodies, franchit les portes de la petite ville. Elle parvient jusqu’au palais de la princesse de Kinsky, dont les soirées musicales sont les événements de la saison mondaine, à Vienne. 

Si Schubert plaît à cette princesse de Kinsky, s’a carrière d’artiste sera faite et son avenir brillamment assuré. Voici donc Franz Schubert, timide et un peu gauche, au milieu de l’assemblée fort élégante d’une haute aristocratie. Prié de s’asseoir au piano, il commence à jouer la Symphonie dont il a composé les premières pages… Le silence se fait. On écoute religieusement les étonnantes phrases de Schubert… 

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Tout d’un coup, une jeune comtesse, arrivée en retard, amusée par le côté comique de Schubert au piano (le costume de soirée qu’il avait loué pour la circonstance portait encore au dos son étiquette…) éclate de rire… Schubert, blême, interdit, se dresse, referme brutalement le piano et sort, au grand scandale de l’assistance.  

Dès lors, la symphonie demeure inachevée. Chaque fois que Schubert essaie de la reprendre, il entend le rire cruel et sot qui l’a si profondément blessé… 

Mais la jeune rieuse, la comtesse Caroline Esterhazy, éprouve du repentir d’avoir causé au brillant artiste une telle peine. Sous prétexte de leçons, elle le fait venir en son château de Hongrie, et, peu à peu, s’éprend de lui. Emu, troublé, Schubert, peu à peu, se grise au contact de cette affection charmante. Il devient follement amoureux et croit pouvoir demander la main de son élève. 

Le père, dont l’orgueilleuse noblesse ne saurait admettre une telle mésalliance, feint cependant d’y consentir, pour éviter tout esclandre, et envoie Schubert à Vienne sous un prétexte quelconque. Puis il lui fait signifier son congé. 

Schubert, dans le désespoir, attend quand même, pendant des mois, un message de sa bien-aimée. Enfin, un mot bref lui demande de venir. Il part sans délai et arrive tout juste pour assister au mariage de Caroline avec un officier de la Cour. 

Marie Esterhazy, la petite sœur de Caroline, l’entraîne à l’écart : « C’est moi qui vous ai appelé. Caroline voulait vous revoir et il faudra que vous lui pardonniez, car elle a dû se soumettre à la volonté du comte, notre père. » 

Schubert, mêlé aux invités, sollicite alors la faveur de jouer la fameuse Symphonie qu’il a achevée dans son exil… Et de nouveau les flots d’harmonie ruissellent du clavier. Mais soudain à l’endroit même de la Symphonie où jadis elle avait éclaté de rire, Caroline éclate en sanglots… 

Affreusement pâle, Schubert se lève et déchire la dernière partie de son œuvre, que la bien-aimée n’a pu entendre… et ainsi la Symphonie demeura inachevée, éternellement. 

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Ecoutez-la, cette Symphonie… Ecoutez-la plusieurs fois. Plus vous l’entendrez plus elle vous charmera. Elle porte au plus haut degré la marque du merveilleux génie de Schubert… Ecoutez aussi quand vous le pourrez : « Le Roi des Aulnes ». et « La Truite », et la sensibilité de Schubert glissera des harmonies au fond de votre âme… Il mourut à 31 ans, en 1828. Il dort aujourd’hui dans le même cimetière que Beethoven, ainsi qu’il l’avait demandé, comme si la même auréole de gloire voulait les unir dans sa lumière. 

Vigenal. « L’Union de Limoge. » 1939.
Dessins de René Giffey.

Einstein et le petit violoniste 

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Le monde musical allemand est dans l’enthousiasme. Un jeune garçon de douze ans, Jehudi Menuhin, s’est révélé prodigieux violoniste.  

Ce wunderkind a exécuté dernièrement à Berlin trois concertos des trois grands B (Bach, Beethoven et Brahms) avec une telle maîtrise que le public lui a fait une immense ovation. L’orchestre était dirigé par Bruno Walter, un des plus célèbres Kapellmeister d’Allemagne.

Albert Einstein, qui était dans la salle, tint à féliciter le petit virtuose : 

« Mon cher petit, lui dit-il, les larmes aux yeux, voilà bien, des années que je n’ai pas éprouvé une émotion semblable à celle que vous m’avez donnée aujourd’hui. » 

A l’Opéra de Dresde, Jehudi Menuhin a remporté un succès aussi vif qu’à Berlin. Nous aurons bientôt, paraît-il le plaisir de l’entendre à Paris. Cet enfant est nè à San-Francisco. Ses parents, qui l’accompagnent en Europe, sont des israélites de modeste origine qui ont émigré de Palestine aux Etats Unis. Comme on leur demandait de qui leur fils pouvait bien avoir hérité ce génie musical, ils répondirent que son grand-père était un rabbi de la secte des Hassidistes, et que sa ferveur religieuse était peut-être à l’origine de cette précocité, musicale du petit-fils.

« L’Européen. » Paris, 1929.

Un poème qui a eu chaud

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Un jour, le maître de chapelle de la cour, Barth, vint chez Beethoven qui était son ami.

  Bonjour ! Qu’y a-t-il de neuf ?
— Vois ! répondit Beethoven en lui tendant un manuscrit. Je fais ceci aujourd’hui, et justement le feu flambe bien dans la cheminée et je veux le jeter dedans.
— Faites voir ?

Barth prit la feuille, la lut, essaya et relut, et dit enfin à Beethoven :

 Je peux essayer de chanter si vous voulez écouter.
—  Chantez si vous voulez.

Barth commença, Beethoven, furetant dans ses papiers, peu à peu devint attentif. Puis il écouta tranquillement. Sa physionomie, d’abord obscure, s’éclaircit, et lorsque le chanteur eût fini, il devint comme illuminé.

Non, mon cher vieux, s’écrie-t-il alors, nous ne brûlerons pas cela.

C’était son poème immortel : Adélaïde.

« L’Argus méridional. » Montpellier, 1860.
Illustration : peinture de Carl Schweninger.